Dis, toi l’ancêtre, viens par là…
Ces derniers jours, je pionce tellement que je me demande si je suis d’une quelconque utilité en ce monde. C’est sûr qu’ailleurs, je dois bosser dur vu l’état dans lequel je me réveille !
Les anges (petites mains du ciel) essaient de m’agripper par le gros doigt (qui montre la direction du ciel) tout en sachant que le bestiaux ne fait pas forcément dans leur légèreté. Bref, tout ça pour dire que je me sens guidé mais aussi terriblement lourd…
Des fois, bien que je sois levé depuis au moins 1/4 d’heure, je continue à être dans le coltard au point d’être obligé d’aller me recoucher pour recadrer les différents corps. Et globalement, je ressens assez souvent les mêmes effets : thymus au boulot, racine et ailes du nez en pleine ébullition, fourmillements vibrationnels dans quasiment tout ce qui est tissu biologique, sans compter les pieds et les mains.
Pour les pieds, j’ai l’impression d’être monté sur 2 plaques chauffantes, tandis que les mains se voient tout bonnement gonflées au point que je n’arrive même plus à plier les doigts ! Je me sens alors comme Bibendum, bouffi et gonflé à bloc.
Enfin, au niveau du dos, le déploiement des ailes se fait au prix de chatouillements pas forcément agréables, tant à certains endroits c’est tout à la fois chaud et sensible. Bref, un arbre pour me frotter le dos ne serait pas de trop dans ma chambre !
On me dit que la chenille se transforme en papillon. Je le comprends, je l’accepte et d’une certaine façon je me dis que c’est super, mais d’un autre côté ne cherchez pas à me demander d’aller faire un 100m car le moindre effort musculaire me fatigue au point d’aller de nouveau écraser l’oreiller avec absolument aucune compassion pour ce qui se trouve dedans…
Dit autrement, quand je commence à avoir les persiennes qui se baissent, mon temps de veille n’en n’a plus que pour quelques minutes. Juste le temps de dire que je me sens fatigué et qu’il faut que je me grouille pour aller m’horizontabiliser dès que possible dans un endroit sûr où l’heure du réveil n’aura aucune importance.
C’est sûr qu’organiser un brin de social là-dessus n’est pas évident, et que la notion de temps linéaire (vous savez, l’horloge ou la toquante de 3D) n’a plus rien à dire. En clair, il n’y a plus de matin ou de midi pour manger mais seulement dès que je pense que j’ai faim, je mange. Le petit-déj pourra s’avaler à 4h de l’après-midi comme à 5h du matin. Bref, les références 3D ont explosées !
Fort de tout cela, j’ai une petite caractéristique qui fait que je me rappelle de presque tous mes rêves, que j’oublie assez rapidement d’ailleurs tellement il y en a. Ça complique un peu la chose parce que d’un certain côté je préfèrerais dormir comme une souche qui ne se souvient de rien car c’est nettement moins fatiguant.
En effet, mes rêves sont généralement assez dans l’action et empruntent généreusement mon imagerie de ce monde de 3D. En clair, quand j’ai les yeux ouverts, ma vie est d’un calme olympien comparé à mes rêves. Je dirais même que c’est largement plus agréable d’être réveillé que de dormir, mais quoi que je fasse quand j’ai les paupières qui se font lourdes, je sais que je ne peux remettre à plus tard le roupillon demandé…
Certains rêves sont d’une telle répétition que, des fois, c’est presque de la survie quand j’arrive à me réveiller. Ainsi, régulièrement, je me réveille avec le disque dur complètement gravé du même mp3 ou de la même vidéo en boucle, et cela me demande des fois plusieurs heures pour arriver à trouver le bouton stop. Je savais que l’on était enseigné de l’autre côté mais là, c’est vraiment du bourrage de crâne.
Et si en plus c’était compréhensible, mais non, la majorité du temps cela n’a ni queue ni tête malgré que ça ait du ventre ! Bref, dans la majorité des cas, je joue au simplet qui se dit qu’il y a un carillon du clocher de l’ego qui n’a pas entendu les autres s’arrêter de jouer. Et donc, je me dis que l’orchestre de 3D est en pleine débandade et que le maestro va bientôt décamper pour cause de honte majeure jouer en UT mineure…
Pour ceux et celles qui ne connaissent pas l’UT mineure (Universal Time en anglais), hé bien c’est le TU (Temps Universel de la 3D). Dit autrement, chaque musicien de l’orchestre commence à jouer selon son tempo qui fait que l’un au lieu de jouer le temps d’un soupir se la joue pause ou demi soupir quand, à contrario, il ne dégringole pas dans le silence carrément.
Bref, si le solfège vous reste un brin obscur, sachez qu’un silence égale 4 temps, une pause 2 temps et un soupir 1 temps. Je vous laisse donc deviner les demi-soupirs (si ça existe vraiment)… Tout ça pour dire que journellement, je commence à perdre les pédales au point de ne plus savoir où j’en suis. Je pense qu’un certain nombre d’entre vous ont déjà expérimenté la perte des repères temporels de la linéarité de 3D.
Je pense que cela doit devenir très gênant quand on va encore au boulot, et c’est la raison pour laquelle je n’y vais plus du tout. Je suis devenu un UN-temporel qui glisse sur les ailes du temps comme un papillon glissera dans tous les courants aériens. On me croit là mais en fait, je papillonne dans d’autres dimensions rarement perceptibles par nos bons vieux sens…
Ainsi, si vous vous sentez de plus en plus évanescent, de plus en plus évaporé, de plus en plus pas vraiment là, ne vous inquiétez pas, c’est que vous êtes en pleine mutation transdimensionnelle. En clair, vous n’êtes pas vraiment là parce que vous êtes partout à la fois et que c’est très perturbant pour nos confrères de 3D très pragmatiques.
Cependant, on découvre un truc assez sympa dans cette histoire. Vous remarquez que lorsque vous regardez quelqu’un (qui que ce soit), il vous sourit tout de suite. C’est bizarre comme impression car vous vous posez la question si c’est votre gueule de clown ou bien votre aspect “simplet du village” qui font qu’ils baissent la garde et vous ouvrent leur cœur d’une certaine manière.
J’en suis venu à me dire que je devais être un soleil qui réchauffe l’intérieur pour qu’ils se déshabillent le cœur si vite. Hé oui, je ne suis pas encore arrivé à les mettre suffisamment en chaleur pour qu’ils se déssappent physiquement mais je crois que cela ferait mauvais genre selon le contexte… alors je n’insiste pas trop sur ce sujet.
Tout ça pour dire que lorsque l’on commence à se sentir papillon, le bruissement de nos ailes avec les petits mouvements d’air associés, les rafraichit tellement avec douceur qu’ils baissent leur garde et s’ouvrent à vous avec un merveilleux sourire. C’est touchant et, en bon prof de la légèreté, je les baffe d’un humour suffisamment pétillant pour qu’ils aient envie de continuer à entretenir l’échange.
Ainsi, une simple opération à un guichet de poste ou à une caisse enregistreuse devient une causante hautement vibratoire où le joyeux s’invite tout naturellement. C’est donc l’un des côtés positifs des travaux en cours.
J’imagine donc un peu quand on aura retiré tous les échafaudages de la 4D-5D et que l’on pourra enfin voir l’œuvre de la restauration. C’est vrai que revenir à l’original, ça doit être classe !
Alors je me dis que toutes ces heures où je roupille, c’est comme si on m’envoyait au cinéma tandis que les ouvriers invisibles s’occupent de restaurer ce qui peuvent du monument historique qui git dans mon lit.
Le seul truc, c’est que leurs films sont quand même pas top. Je suppose qu’ils doivent se servir dans ma bibliothèque privée afin que je me souvienne de ce que je dois lâcher. Je suis sûr qu’ils sont suffisamment intelligents pour nous travailler sur tous les plans à la fois.
Voilà ce qu’aujourd’hui je vous écris car, dans mon état de semi-veille actuel, je peine un peu à voir loin malgré ma nouvelle paire de lunette qui semble me montrer une vision quelque peu différente d’avant.
Avec toutes mes meilleures salutations angélico-déliro-rêviques, je vous embrasse de toute ma fraternitude semi-consciente…
Laurent DUREAU
